Dans la nuit de Vendredi 10 à Samedi 11 juin 2011, l'Assemblée nationale examinait la loi de finaNce rectificative pour 2011. Parmi les très nombreuses mesures, celle du financement de la "garde à vue".
L'article 20 de la loi de finance rectificative prévoyait, conformément aux voeux de la Commission des Finances présidée par Gilles CARREZ, prévoyait que les fonds AJ et CO seraient versés à l'UNCA à charge pour elle de les dispatcher entre les différentes CARPA des différents Barreaux. L'UNCA n'est-elle pas l'Union Nationale regroupant toutes les CARPA de France et d'Outre Mer ?
En fait, au lieu d'un versement auprès de chaque CARPA comme actuellement; la Chancellerie les verserait globalement à la Profession et c'est elle qui, ensuite, répartirait les fonds. Sauf que la répartition engendrerait des frais (de répartition) devant désormais être supportés par la Profession au lieu de l'Etat, que peut-on objecter à ce modus operandi ?
Dans l'après midi de Vendredi, pendant les débats, le Gouvernement déposait un amendement 1567 au termes duquel ces fonds ne seraient plus versés à l'UNCA (c'est-à-dire aux CARPA) mais ...au CNB.
« VI. - La contribution pour l'aide juridique est affectée au Conseil national des barreaux. ».
commentaires :
Cet amendement tend à modifier les conditions dans lesquelles va être géré le produit de la contribution pour l'aide juridique. Il prévoit que cette gestion, délégation d'une mission de service public, sera confiée au Conseil national des barreaux, établissement d'utilité publique chargé par l'article 21-1 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques de représenter la profession d'avocat notamment auprès des pouvoirs publics.
Et pour faire bonne mesure, la Loi de Finance rectificative en profiterait, selon l'amendement déposé, pour accroitre les pouvoirs du CNB c'est-à-dire procèderait à une modification de la Loi de 1971 :
S'agissant d'une nouvelle compétence du Conseil national des barreaux, il convient par cohérence de modifier l'article 21-1 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques.
De même, par cohérence avec la mission de service public de perception et de répartition du produit de la contribution pour l'aide juridique confiée au Conseil national des barreaux, les dispositions de l'article 28 de la loi relative à l'aide juridique précisant les conditions dans lesquelles est calculée et liquidée la dotation due par l'État au titre de l'aide juridictionnelle doivent être modifiées.
Cet amendement 1567 a été retiré dans la nuit, donc quelques heures après avoir été déposé, pour l'article 20 de la loi de finance être voté dans les termes initiaux au petit matin, à 6h.
Nous l'avons échappé belle.....
Par l'effet d'une simple loi de finances rectificative, on aurait à la fois :
- dépossédé les Barreaux et les CARPA de ses pouvoirs actuels,
- augmenté les pouvoirs du CNB
Force est de constater que notre Législateur veille au grain.
Contrairement à ce que voulait le CNB, les Barreaux ont pu conserver leur entier pouvoir en matière "informatique" qui inclut désormais la "communication électronique" ( nouvel article 18 de la loi 71-1130 du 31 Décembre 1971).
Rappelons juste que le CNB soutenait, contre l'évidence même, que les Barreaux étaient compétent en "informatique", ce qui n'incluait pas la "communication électronique".
Le Législateur lui a infligé un démenti cinglant.... Mérité !
Avec la Loi de finances rectificative pour 2011, pareil procédé a failli se répéter : d'abord avec l'amendement 1468 de Madame GROSSKOST dont on imagine aisément qu'il est déposé à l'initiative du CNB, relayé par l'amendement 1567 du Gouvernement : les deux sont retirés, Madame GROSSKOST n'ayant pas soutenu son propre amendement !
Deux amendements pour retirer subrepticement des pouvoirs aux Barreaux et aux CARPA afin de les attribuer au CNB : en sourdine, l'air de rien.
Je le répète, nous l'avons donc échappé belle....
Et comme le texte revient devant le Sénat le 21 Juin prochain, il est intéressant de savoir ce qu'en pense la Commission des Finances du Sénat présidée par Jean ARTHUIS.
Elle confirme que les CARPA - c'est-à-dire les Barreaux - sont les mieux placés pour se voir octroyer les fonds des AJ et des CO.
Qu'il est intéressant naturel de les affecter à l'UNCA qui reçoit ainsi une mission de service public parce qu'elle constitue l'Union de toutes les CARPA qui, jusqu'à présent, recevaient directement les fonds.
Son rôle est justement apprécié par les Sénateurs dans un rapport que je ne veux pas paraphraser...
Bref, il n'est pas question pour les Sénateurs que les fonds soient retirés aux Barreaux et aux CARPA et il n'est pas question d'accroitre les pouvoirs du CNB.
Ainsi, les deux problèmes sont réglés.
Vous trouverez en téléchargement le texte de l'article 20 proposé et adopté par les Députés puis le rapport de la Commission des finances du Sénat ( limité à l'article 20 qui nous intéresse ).
Quand je me souviens des propos peu aimables du CNB à l'égard de l'UNCA lorsque le Barreau de Marseille lui a fait expertiser, la "solution nomade et mutualisée" parce que c'est l'organe technique de notre profession, et que je me souviens que l'UNCA a conclu à la parfaite sécurité du système, ce que six mois après le rapport de Monsieur HATTAB, sommité de l'expertise informatique, a confirmé, je me pose des question sur le "jugement" du CNB.
C'est alors que je me dis que le CNB doit rester dans son rôle "politique" et laisser les organes "techniques" gérer les problèmes techniques, qu'il s'agisse d'informatique ou de comptabilité voire de finances.
En somme, on pourrait sans difficulté soutenir que le CNB n'a aucun raison de vouloir se mêler des fonds de l'AJ et des "gardes à vue".
Ayant eu à examiner le budget prévisionnel du CNB pour 2011, obtenu par indiscrétions, les observations sont sur mon blog, j'ai donné plusieurs arguments qui inclinent à penser qu'il est infiniment préférable que les fonds ne lui soient pas attribués, alors que sa comptabilité n'est pas publiée.
Ce serait même une comptabilité curieusement secrète alors que la transparence est nécessaire.
D'ailleurs, le CNB dispose-t-il d'un compte "maniements de fonds" ? Bonne question, non ?
Au moment où il va être question du second rapport sur la "gouvernance", il va falloir que de sérieuses réformes soient entreprises, une "révolution" même car il y a manifestement beaucoup trop de choses qui ne tournent pas rond....
Des réformes de fond en comble....
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